Quand ceux qui vont, s'en vont aller, Quand le dernier jour s'est levé, Dans la lumière blonde, Quand ceux qui vont, s'en vont aller, Pour toujours et à tout jamais, Sous la terre profonde, Quand la lumière s'est voilée, Quand ceux que nous avons aimés, Vont fermer leur paupières, Si rien ne leur est épargné, Oh, que du moins soit exaucée, Leur dernière prière, Qu'ils dorment, s'endorment, Tranquilles, tranquilles.
Qu'ils ne meurent pas au fusil, En expirant déjà la vie, Qu'à peine, ils allaient vivre, Qu'ils ne gémissent pas leurs cris, Seuls, rejetés ou incompris, Éloignés de leurs frères, Qu'ils ne meurent pas en troupeau, Ou bien, poignardés dans le dos, Ou qu'ils ne s'acheminent, En un long troupeau de la mort, Sans ciel, sans arbre et sans décor, Le feu à la poitrine.
Eux qui n'avaient rien demandé, Mais qui savaient s'émerveiller, D'être venus sur terre, Qu'on leur laisse choisir, au moins, Le pays, fut-il lointain, De leur heure dernière, Qu'ils aillent donc coucher leurs corps, Dessous les ciels pourpres et or, Au-delà des frontières, Ou qu'ils s'endorment, enlacés, Comme d'éternels fiancés, Dans la blonde lumière, Mais, qu'ils dorment, s'endorment, Tranquilles, tranquilles.
Quand ceux qui vont s'en vont aller, Pour toujours et à tout jamais, Au jardin du silence, Sous leur froide maison de marbre, Dans les grandes allées sans arbre, Je pense à vous, ma mère, Qu'ils aient, pour dernier souvenir, La chaleur de notre sourire, Comme étreinte dernière,
Peut-être qu'ils dormirons mieux, Si nous pouvons fermer leurs yeux, A leur heure dernière, Qu'ils dorment...