Noyé dans la ville J’entrevois une teinte qui colore nos grottes bétonnées d’une étrange toison d’or Alors j’aimerais voir les épis de blé repousser sur les Champs-Elysées Pour rire avec Belle des Champs [Fuzati Avant de la violer] Malgré une brise qui défie la moiteur J’ai des sueurs Autant qu’un beauf du télé-achat sur le body-trainer En travelling perpétuel, mon oeil filme le panorama : Une vieille dame parle à un banc qui lui répondra pas J’aimerais être le néant, ne plus penser comme si J’étais le cerveau de Sami Naceri croisé à celui de Mathilde Seigner Les graffitis dansent sur les murs quand la nuit se dessine Et une abeille butine un jus de leechee dans une canette tchin-tchin D’un coup, il me pousse des plumes à la place des doigts Et d’un battement de cil, je m’évapore loin de ça Apaisé comme si j’étais entre deux seins bien roulés Je me sens bien comme dans un cocon fait de PQ alvéolé Tekilatex
J’ai décidé d’éteindre la télévision cet après-midi pour m’aventurer dans les rues moites puisque c’est l’été Les gens prennent leur temps, mais leurs gestes sont figés Les touristes se déplacent en colonies de termites Les monolithes sortis du sol tentent d’atteindre un ciel peint Et c’est lorsque je regarde en l’air que j’ai le vertige Des autos grises circulent dans ce Monopoly Assis sur un terre-plein Je contemple ma rue, je respire Je transpire et retranscris les rêves dans les histoires que je me raconte Pour que le temps passe plus vite et j’en profite pour gagner à chaque fois Mon pain au chocolat a une drôle d’allure rabougrie Il y a du gras sur mon cahier et toutes les feuilles sont collées Et je suis Infiniment petit Personne ne m’entend si je crie Je saute de pavé en pavé en évitant les gouttes de pluie Il pleut mais il fait chaud, sous ma capuche j’ai l’air d’un esquimeau Je n’ai pas pris l’habitude de revêtir mes vêtements estivaux Nez à nez avec les jambes des gens je marche lentement Pour arriver au parc je ne pensais pas que je mettrais tant de temps J’enjambe la grille et je suis sur mon territoire Ma ville à moi c’est mon square C’est pas pour de vrai mais j’ai l’air d’y croire dur comme fer Le sable est mouillé, les articulations de mes robots transformables sont rouillées C’est juste l’enfer mais c’est pas non plus la fin du monde J’ai ma panoplie de super héros et mon parapluie est rangé dans mon cartable Un tas de sable, une jeunesse perdue dans une chrysalide A l’abris des responsabilités Pour ma sécurité A l’abris du monde extérieur, à l’abris des intempéries, à l’abris de la vie J’ai tout pour être heureux mais pas stable. Fuzati
Je ne suis qu'un jeune bipède Enfermé dans un petit parallelepipède D'où je m'extrais quelques fois afin d'évoluer à l'intérieur de vastes artères remplies de gaz incolores mais nocifs pour mes alvéoles pulmonaires Sur ma rétine s'incruste des formes très diverses Je me protège en cas d'averse sortant de l'extension de mon épine dorsale, un revêtement composé de matière plastique Absorbé par l'écoute de ma bande magnétique J'avance...je marche, tout seul, dans la ville Les rayons du soleil, en me transperçant, projètent sur le bitume l'empreinte de mon âme Qu’une nuée de semelles viennent piétiner C'est pour cela que je n'avance qu'à la lumière artificielle Même si je sais qu'elle n'attire vers elle Que des créatures aux blessures mortelles Pour les femelles de mon éspèce, je n'existe pas Moyennant l'échange de quelques billets, certaines acceptent de toucher ma sensibilité Mais sans succès... Une lame rétractable me tient à l'abris des autres bipèdes Comme les chats qui se tiennent sur leurs pattes arrières Je sais qu'ils voudraient altérer ma vision d'un coup de griffe afin que je cesse de raconter aux gens ce que je vois la nuit Une à une, j'ai gravis les marches de cet immeuble afin de contempler le complexe architectural dans sa globalité Je n'étais qu'un jeune bipède, égaré parmis des milliers d'autres jeunes bipèdes Je regarde le soleil, j'ai ma vie dans ma main, mes pieds quittent le sol... Je m'envole... Cyanure
Je lève la tête, admire l’envol d’un oiseau si haut se rapprochant comme une goutte d’eau Puis mon attention le laisse libre de mon regard quand me percute Sans presque n’y prêter gare, à l’entrée du square Ce jeune enfant que les adultes effarent Les notes Comme les clefs à mes menottes, Sur une portée libèrent mes mots Transcrivent de ma mémo- -oire à ma feuille des émo- -tions Le son de mon walkman m’isole des autres C’est lui qui d’une plage à l’autre rend palpables mes expressions Je reste pourtant invisible dans une foule menaçante Parlant à son portable donc doublement absente Les basses et les aiguës de mes écouteurs Affrontent la ville et ses couleurs Grises, car la population ne regarde que ses trottoirs, chacun gérant sa crise Indiquant ma présence que seulement après avoir traversé une flaque Quand l’espace d’un trottoir mes pas me trahissent aux yeux des autres Laissant leurs humides marques Croisant un autre moi Un homme regardant une vieille dame qui parle à un banc qui ne lui répondra pas Ville Ville dans laquelle le monde tourne. S’il S’il te plait observe aussi ceux qui marchent assis. File Entre les ombres du tumulte qui défilent sur tous sites Sil- -houettes m’effaçant parmi les dangers des automobiles Et des landaus tranquilles Invisible, je reste, frôle la beauté des monuments sans plus n’y prêter attention Cette latitude C’est celle de la ville qui m’a conformé à ses habitudes