Huit heures par jour, vissé à ma machine Une vie transparente, soudée à mon usine La casquette de travers, j'avais la classe ouvrière C'était toute ma vie, mon droit à la misère Jusqu'à cette lettre qui dit "Encore merci C'est ça ou RMI dans un faubourg de Varsovie" J'ai rien contre la Pologne à part peut-être un pape ou deux Mais dans ma ville du Nord, le gris du décor est plus bleu
Mais je me connais, je lâcherai pas l'affaire Je vais piquet de grève comme on pique une colère Plus têtu que tous les "Vieil homme et la mer" Pour que continue le combat ordinaire
Si mon vieux me voyait, il serait fier de moi Lui qui était communiste comme on porte une croix S'il existe un Dieu pour les mineurs syndicalistes J'espère qu'au paradis les anges sont un peu marxistes Chez nous, le chômage fait partie de la famille Comme l'amiante, l'oubli, la silicose et les terrils Quantités négligeables don't la vie ne tient qu'à un fil Certains soignent la peur du vide à coup de vingt-et-un avril
Mais je me connais, je lâcherai pas l'affaire Je vais piquet de grève comme on pique une colère Plus têtu que tous les "Vieil homme et la mer" Pour que continue le combat ordinaire
Moi, je sais planter des clous, moi, je sais rester debout Moi, je sais souder à l'arc et moi, je n'ai jamais le trac Et moi, je sais la peur du vide, moi, je n'ai pas pris une ride Moi, je sais toucher le fond et j'ai du charbon sur mon front Et moi, je sais lever le poing, moi, je n'oublie jamais rien Moi, je sais rester humain, je sais toujours d'où je viens Et moi, j'ai le sens du combat, moi, j'ai des cals sur mes doigts Moi, j'ai toujours mes mains d'or, moi, je voudrais vivre encore Et moi, j'ai plus de cinquante piges, moi, je n'ai jamais le vertige Moi, je sais rester de glace devant le temps qui m'efface
Mais je me connais, je lâcherai pas l'affaire Je vais piquet de grève comme on pique une colère Plus têtu que tous les "Vieil homme et la mer" Pour que continue le combat ordinaire