Après trois semaines entières D’un bonheur que rien n’altérait Mon amant dont j’étais si fière Un triste matin me plaquait.
Pour calmer mon âme chagrine Je résolus en un sursaut De me piquer à la morphine Ou de priser de la coco.
Mais ça coûte cher tous ces machins, Alors pour fuir mon noir destin :
J’ai fumé de l’eucalyptus, Et je m’en vais à la dérive. Fumant comme une locomotive Avec aux lèvres un rictus. J'ai fumé de l'eucalyptus.
Dès lors mon âme torturée Ne connut plus que d’affreux jours ; La rue du désir fut barrée Par les gravats de notre amour.
J’aurais pu d’une main câline Couper le traître en petits morceaux, Le recoller à la sécotine Pour le redécouper aussitôt.
Mais je l’aimais tant l’animal, Alors pour pas lui faire du mal :
J’ai sniffé d’la naphtaline, Les cheveux hagards, l’œil hérissé. Je me suis mise à me fourrer Des boules entières dans les narines. J’ai sniffé d’la naphtaline.
Qu’ai-je fait là, Jésus Marie. C’est stupéfiant comme résultat, Au lieu de m’alléger la vie, Je me suis alourdie l’estomac.
J’ai dû prendre du charbon Belloc ; Ça m’a fait la langue toute noire. Que faire alors j’ai, pauvre loque, Essayé un autre exutoire ?
Car le pire, c’est que j’ai pris le pli, Et c’est tant pis quand le pli est pris.
Je me pique à l’eau de Javel Pour oublier celui que j'aime. Je prends la seringue Et j’en bois même, Alors il me pousse des ailes ! Je me pique à l’eau de Javel, Je me pique à l’eau de Javel.