Barricadé dans mon appartement, ce soir je flippe Je sens qu'ils m'observent plus qu'assidûment Tapi dans un recoin lugubre, derrière le télécran veille Je sais qu'ils traquent dur mon insalubre mental Je gêne dans leurs projets, leur travail de contrôle Auquel j'ai longtemps participé Nous sommes en 1984 Dehors, la pluie ruisselle sur un monde fade et grisâtre Les espoirs tombent aux pieds des bâtiments massifs La police de la pensée traque et s'agite Stresse et s'agrippe Blesse et salit mon âme, rongée de vices Puisqu'en dissidence au parti unique Merde ! Coincé comme un rat, comme un cas isolé Dans un angle mort, secteur quatre, zone b Je me surprends même à pleurer quelques larmes Elles ont le goût du gin que j'ingurgite comme des lames
En pleine nuit, la porte saute Des faisceaux de lumière balayent les murs "Vous êtes en faute !", clament des silhouettes En armure massives, on me plaque au sol En dix secondes, je suis bâillonné Dans un vêtement opaque et sale Je ne vois plus rien, j'entends des pas lourds Une douleur dans le bras, et je m'écroule dans un bruit sourd… Quand j'ai ouvert les yeux, j'avais froid, mal, faim Sur chaque mur, des écrans me dévisageaient comme un chien Chaque façade blanche aveuglante m'agaçait Des murs de carrelage sinistres oppressants m'agressaient "Tu veux jouer au con, ici les choix se font sans urnes, La sentence, tu connais, conduisez-le salle 101"
Salle 101, toutes les phobies y trinquent Tu ressors de là persuadé que 2+2=5 Tu n'obéis plus bêtement, tu aimeras ce qu'on t'impose Big Brother, c'est la force, celle de ne rien remettre en cause On m'a traîné sur un siège métallique "Un dernier met, Monsieur Smith ?" "Je voudrais une orange mécanique, connard Je hais ton monde et tout ce qu'il engendre Des décombres, des morts, et des zombies sous des cendres"
Je m'appelais Winston Smith, j'avais 39 ans Je suis mort salle 101, j'étais malade mentalement…