Debout! Les damnés de la terre! Debout! Les forcats de la faim! La raison tonne en son cratère: C’est l’éruption de la fin. Du passé faisons table rase, Foule esclave, debout! debout! Le monde va changer de base: Nous ne sommes rien, soyons tout!
2
Il n’est de sauveurs suprêmes! Ni Dieu, ni César, ni Tribun. Producteurs, sauvons-nous nous-mêmes! Décrétons le salut commun! Pour que le voleur rende gorge, Pour tirer l’esprit du cachot, Soufflons nous mêmes notre forge, Battons le fer quand il est chaud!
3
L’État comprime et la loi triche; L’Impôt saigne le malheureux; Nul devoir ne s’impose au riche; Le droit du pauvre est un mot creux. C’est assez languir en tutelle, L’égalité veut d’autres lois; «Pas de droits sans devoirs, — dit-elle, Egaux, pas de devoirs sans droits!»
4
Hideux dans leur apothéose, Les rois de la mine et du rail Ont-ils jamais fait autre chose Que dévaliser le travail? Dans les coffres-forts de la bande Ce qu’il a créé s’est fondu: En décrétant qu’on le lui rende Le peuple ne veut que son dû.
5
Les Rois nous soûlaient de fumées, Paix entre nous, guerre aux tyrans, Appliquons la grève aux armées, Crosse en l’air et rompons les rangs! S’ils s’obstinent, ces cannibales, A faire de nous des héros, Ils sauront bientôt que nos balles Sont pour nos propres généraux.
6
Ouvriers, paysans, nous sommes Le grand parti des travailleurs: La terre n’appartient qu’aux hommes L’oisif ira loger ailleurs. Combien de nos chairs se repaissent! Mais, si les corbeaux, les vautours, Un de ces matins, disparaissent, Le soleil brillera toujours!