Loin des oiseaux, des troupeaux, des villageoises, Que buvais-je, à genoux dans cette bruyère Entourée de tendres bois de noisetiers, Dans un brouillard d'après-midi tiède et vert !
Que pouvais-je boire dans cette jeune Oise, -- Ormeaux sans voix, gazon sans fleurs, ciel couvert !-- Boire à ces gourdes jaunes, loin de ma case Chérie? Quelque liqueur d'or qui fait suer.
Je faisais une louche enseigne d'auberge. -- Un orage vint chasser le ciel. Au soir L'eau des bois se perdait sur les sables vierges, Le vent de Dieu jetait des glaçons aux mares ;
Pleurant, je voyais de l'or --et ne pus boire. --
Arthur RIMBAUD, Une Saison en enfer (1873) (version remaniée du poème \"Larme\" de mai 1872)